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jean-michel tesseron
11 janvier 2018

Les métaux rares et les sales dessous des technologies vertes

métaux rares dans le mondeLes métaux rares: un sujet rarement évoqué jusqu'à présent par les politiciens et les média.

Pourtant, ils vont être la clef de la transition énergétique et des évolutions technologiques. Problème: seuls quelques pays en disposent dans leur sol, et la France, encore plus que pour le pétrole et le gaz jadis, en est dépourvue.

Le 19 Mai 2016, le Sénat avait publié le rapport "Les enjeux stratégiques des terres rares et des matières premières stratégiques et critiques" pour aborder cet enjeu important (voir à la fin de cette page).

Ce jeudi 11 janvier 2018, deux articles, parus dans Le Monde et dans L'Obs, viennent traiter de la question, à l'occasion de la parution du livre de Guillaume Pitron, "La guerre des métaux rares" aux Éditions "Les liens qui libèrent".

Après lecture de ces deux articles, il s'agit manifestement d'un livre indispensable pour apprécier cet enjeu majeur de la transition énergétique.

 L'article du Monde (numéro daté du vendredi 12 janvier), écrit par l'auteur du livre, explique que "depuis le début du XXIème siècle les hommes, inquiets des bouleversements climatiques générés par les énergies fossiles, ont mis au point de nouvelles inventions, réputées plus efficientes, plus propres, et reliées à des réseaux à haute tension ultra-performants: les éoliennes, les panneaux solaires, les batteries électriques"...

Mais toutes ces technologies reposent sur les propriétés magnétiques et chimiques d'une multitude de petits métaux rares qui sont contenus dans les roches terrestres dans des proportions bien plus infimes que l'or, l'argent, le cuivre, le plomb et l'aluminium utilisés jusqu'alors par l'industrie. Il en est de même pour les technologies numériques.

Ce faisant, les "métaux rares" étant précisément rares par définition, la planète se lance dans la transition énergétique en mettant son avenir dans les mains d'un faible nombre de pays qui les détiennent dans leurs sous-sols, et en particulier la Chine, qui n'est pas un partenaire si accommodant.bann_ressources_min_003

 

Par ailleurs, sur le plan écologique, Guillaume Pitron insiste sur le fait que "l'exploitation intensifiée de l'écorce terrestre qui sera nécessaire pour extraire les métaux rares aura des impacts environnementaux encore plus importants que ceux générés par l'extraction pétrolière."

En conséquence, "tous les pans les plus stratégiques des économies du futur, toutes les technologies qui décupleront nos capacités de calcul et moderniseront notre façon de de consommer de l'énergie, le moindre de nos gestes quotidiens et même nos grands choix collectifs vont se révéler totalement tributaires des métaux rares".

Par conséquent, alors que nous pensions nous affranchir des pénuries, des tensions et des crises créées par notre appétit de pétrole et de charbon, il faut nous attendre à de profonds conflits économiques et géopolitiques, conjugués à des désastres environnementaux.

 

L'Obs a choisi un titre plus abrupt pour traiter du livre: "les sales dessous des technologies vertes".

Ecrit à partir de propos recueillis par Pascal Riché auprès de Guillaume Pitron, l'auteur du livre "La guerre des métaux rares", cet article de l'Obs me semble particulièrement intéressant dans la mesure où il appuie encore plus explicitement que celui du Monde là où cela fait mal sur le fond: "Véhicules électriques, énergies renouvelables, compteurs intelligents, s'il est un sujet qui fait l'unanimité, c'est bien la transition énergétique... Tout le monde l'aime, cette transition, à droite, à gauche, au centre aux extrêmes..." "Mais cette révolution n'est pas si propre: elle repose sur des technologies avides de métaux aux noms souvent barbares - antimoine, germanium, lithium, cobalt, bismuth, terres rares, dont l'extraction est extrêmement polluante". Cela n'empêche pas la plupart des bons apôtres de vanter le stockage de l'électricité, en oubliant que l'extraction du lithium nécessaire aux batteries est dévastatrice pour les pays où elle s'effectue - il est vrai que l'Amérique Latine est si lointaine, en tout cas si absente des média...

Mais le problème de l'extraction des métaux rares dépasse de loin le cas du lithium.

Aussi, l'article de l'Obs fait mal en insistant sur le fait que "la transition énergétique repose sur une mystification, celle selon laquelle les technologies vont comme par miracle apporter la solution à nos défis environnementaux et constituer le point d'équilibre entre le désir d'un monde plus vert et celui d'une consommation toujours plus grande".

L'expression "croissance verte" n'est donc qu'un oxymore, et il va falloir nous réveiller. "Elle nous détourne de la vraie révolution que nous devrions entreprendre, celle de nos modes de consommation, de nos comportements... Elle nous place dans une situation de déni, ce qui est confortable mais ne résout rien." Il n'est pas si facile que cela de renoncer à une partie de sa consommation, des ses voyages, de ses plaisirs. En tout cas, c'est moins facile que d'attribuer aux autres ce qui va mal.

La "croissance verte", y compris les énergies renouvelables, ne fait que déplacer les problèmes actuels liés à l'exploitation du pétrole, avec la particularité que les métaux rares sont encore plus rares que le pétrole restant sur la planète, et que quelques pays en détiennent la quasi totalité. Tout cela va redistribuer les cartes.

Pas de chance pour la France, qui n'est pas mieux placée que pour le pétrole.

 

potentiel_minier_France_BRGMIci, et cela interpelle forcément, Guillaume Pitron affirme qu'ouvrir des mines de métaux rares en France serait la décision écologiste la plus courageuse qui soit.

Ouvrir ces mines, cela implique inévitablement l'obtention de permis d'extraction (à moins de recourir à des procédures moins démocratiques ainsi que cela se fait dans des pays comme la Chine), et la production inévitable de pollution tant pour l'extraction que pour le retraitement des métaux.

Je crois connaître la réponse que cette proposition suscitera: "Not in my backyard!"

Nous n'en avons donc sans doute pas fini avec les ZAD.

 

A noter le rapport du Sénat n° 617 du 19 Mai 2016 disponible sur son site: "LES ENJEUX STRATÉGIQUES DES TERRES RARES ET DES MATIÈRES PREMIÈRES STRATÉGIQUES ET CRITIQUES" (disponible en format pdf, 1,2Mo)

 

Les enjeux stratégiques des terres rares et des matières premières stratégiques et critiques

Les enjeux stratégiques des terres rares et des matières premières stratégiques et critiques : Les enjeux stratégiques des terres rares et des matières premières stratégiques et critiques

http://www.senat.fr

 

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jean-michel tesseron
  • Vie multiple: ingénieur Supelec à EDF puis RTE; musique bretonne; théâtre; poésie; foi chrétienne; philosophie; politique; actualité; points de vue; citations; coups de cœur; transition énergétique; photos de paysages, personnes, lieux aimés, portraits
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