Déficit démocratique européen

J'ai déjà évoqué ici à maintes reprises la question du déficit démocratique européen, notamment à l'occasion de la négociation des traités internationaux de libre-échange par L'Union européenne, ou plutôt, disons-le franchement, par la Commission européenne, puisque c'est cette dernière qui négocie en grand secret les futurs traités.

Il se trouve des personnalités et des média pour contester qu'il y ait déficit démocratique européen. Voici un court-extrait du journal Les Echos: "L'Union européenne est critiquée pour son déficit démocratique. Ces critiques ne sont pas fondées. L'Union européenne n'est pas de même nature que les Etats-membres, les critères pour juger de sa légitimité sont différents. De plus, le système européen n'est pas dénué d'avantages."

Pourtant, il n’est pas difficile de voir pourquoi les institutions européennes manquent de légitimité démocratique. Seul un organisme de l’Union européenne est élu directement au niveau européen : le Parlement. Il a beaucoup moins de pouvoir que ses homologues nationaux, et son élection, qui a lieu sur un mode décentralisé, ne mobilise que faiblement les électeurs de chaque pays, qui choisissent parmi des partis nationaux en fonction de questions nationales plutôt qu’européennes. La Commission européenne est très largement perçue comme un organe technocratique et lointain, et c'est à juste titre, puisque d'une part ses membres ont un pouvoir considérable sans avoir été élus, et que d'autre part la Commission est la seule institution européenne à décider quels textes législatifs elle préparera et présentera pour adoption par le Parlement et le Conseil.

De plus, les rôles et fonctionnements de l'ensemble des institutions européennes sont difficiles à comprendre pour les citoyens européens.

La Cour de justice européenne, constituée de quinze juges nommés, a, en revanche, un pouvoir relativement étendu comparé aux normes européennes. Le Conseil des ministres, la plus puissante des institutions bruxelloises, rassemble des ministres, des diplomates et des officiels de chaque pays qui délibèrent eux-aussi souvent en secret.

Les directives européennes promeuvent un élargissement et un approfondissement du marché et ne proposent en compensation qu’un nombre limité de politiques sociales. Dans l'Union européenne, le dogme est clairement affirmé et sert de maître-directeur à tout ce qui se fait: "Tu n'auras qu'un seul dieu, le Marché."

Enfin, soulignons le pouvoir énorme des lobbys influant sur la politique européenne. A Bruxelles, les eurodéputés sont l'objet de toutes les attentions, avec des groupes de pression qui prolifèrent pour peser sur un marché de 500 millions de consommateurs. La puissance des lobbies saute aux yeux. Les grands noms du monde des affaires occupent chaque immeuble de bureau dans un rayon d'un kilomètre autour des sièges de la Commission, du Conseil et du Parlement européens. Bruxelles compte plus de lobbyistes que Washington, avec 10 000 organismes inscrits au registre européen des lobbies; parmi eux, des ONG, mais surtout des grandes entreprises, des associations industrielles et des cabinets de consultants. Leur budget annuel est d'environ 1 milliard d'euros. Au total, près de 30 000 lobbyistes officieraient auprès des institutions européennes, selon l’association spécialisée dans le contrôle du lobbying Corporate Europe Observatory.

En conclusion, il est bien temps de changer tout cela, car les conséquences sont bien visibles, avec la montée du sentiment anti-européen et la progression dans beaucoup de pays de partis d'extrême-droite s'appuyant - entre autres - sur ce sentiment.